Le
cinéma peut-il avoir la prétention d’agir sur nos réalités sociales ? Le dernier long
métrage de Jean Pierre Bekolo est une tentative de renversement d’un état qui
dure depuis 42 ans.
Le président se transforme en mythe tant sa réalité
est complexe à saisir. Tout va mal dans
le pays. Ce jour-là, le président décide d’aller dans son village natal
et se perd en route. Dans le pays,
personne ne peut donner de vraies nouvelles du président. Les medias tâtonnent alors
que le pays est sous le choc. Jean-Pierre Bekolo fait le diagnostic de ce
délitement et tente une prescription à travers un ensemble de techniques cinématographiques.
Dans ce film, il se
dégage visiblement un engagement. Description de l’état de la nation du président
disparu. Autant l’accent est mis sur la disparition qui fait la une de tous les
journaux autant l’état de la nation est exposé. Le film accorde une place de
choix aux medias. Ce choix fait appel à l’utilisation de multiples mini-plans
qui sont une représentation esthétique
des medias.
Des reportages tout le
long du film paraissent comme une sorte de documentaire. Les différentes
descriptions sur l’état chaotique de la nation, les multiples interrogations
sans réponses adressées au président ne font qu’appuyer cet aspect documentaire
du film. La musique se taille une place méritoire dans le film. Elle en
arrivera même à ravir la vedette au dialogue. En ce moment le cinéma muet
s’invite. La musique très expressive accompagne beaucoup de scènes dans la
progression du récit. Le jeu des acteurs rend aussi compte de ce caractère
muet : les échanges se font à travers des bouts de papiers qu’ils font
circuler entre eux. Bekolo se fait donc épauler par plusieurs genres pour conduire son œuvre à destination :
celle de faire d’elle un vecteur de changement ou renversement de situation.
Jean-Pierre Bekolo
parlant de son film confie « on a un
président qui est là depuis 30 ans, qui ne veut pas partir, et puis aujourd’hui
il a quand même 80 ans. On se demande
comment il va partir; de ce coté il n’y a pas de doute, c’est une histoire
vraie. Le cinéma permet de jouer avec tous ces éléments. On part de la réalité
pour déboucher sur la fiction et de la fiction pour déboucher sur la réalité. »
Cependant, les déperditions
constatées dans l’adaptation de cette réalité ne confirment-elles pas son
caractère fictionnel et font des impressions du spectateur averti un simple
effet de vérisimilitude ?
Valentine Sanou. Doctorante
en cinéma. Université de Ouagadougou
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